Chaque été, le vallon de Champagny-le-Haut est investi par de petites estivantes ailées et bourdonnantes : les abeilles, déposées avec leurs ruches par des apiculteurs locaux. Une villégiature 5*, au calme à 1 500 m d’altitude, où l’intense floraison de montagne se concentre sur trois semaines. De ces ruches peuvent s'échapper des essaims qui s’installent dans certaines parties creuses de la tour de 24 m de haut, englacée l’hiver, mais qui devient refuge de choix l’été pour les insectes en recherche d’un lieu de reproduction. Une colonisation qui, en 2017, a déclenché la vocation d'apiculteur de Damien Souvy, guide de haute montagne et gardien passionné de la tour.
Un déménagement qui donne le vertige
Vers début juillet, deux à trois essaims échappés des ruches alentour s’installent à plus de 20 m de haut sur les parties boisées de la tour. Les insectes sont probablement attirés par les phéromones sur les panneaux de bois, mais aussi la bonne orientation de la tour. En 2017, c’est le parapentiste local Antoine Mercier, apiculteur à l’époque, qui sensibilise Damien à la nécessité de déplacer les essaims pour les replacer dans des ruches :
« Antoine était débutant en escalade, et moi en abeilles ! Je ne mangeais même pas de miel. Ça a donc été plutôt épique de grimper tout là-haut et de démonter des panneaux en bois qui prenaient toute la largeur de la tour pour accéder aux insectes. Je devais préparer la tour pour accueillir la sélection nationale d’escalade en Équipe de France. Antoine souhaitait récupérer ces abeilles pour ses ruches, notamment car cela coûte cher d’en acheter ».
Intrigué par l’expérience et de nature curieuse, Damien s’intéresse à ces insectes, mais c’est un accident de parapente en 2019 qui va lui donner le temps de se pencher plus sérieusement sur le monde de l’apiculture.

Un apiculteur est né
C’est ainsi que commence la production de Damien et les premiers pots aux couleurs de Bee Alpi :
Lors de ma convalescence, j’ai eu le temps de m’autoformer, je me suis documenté, j’ai vraiment creusé le sujet et j’ai réussi à faire du miel assez rapidement.
Désormais, au plus fort de la production, Damien gère plus de 30 ruches (80 000 abeilles / ruche) pour une production de 1,6 tonne de miel, soit plus de 40 kg par ruche : « À l’échelle nationale, c’est une belle production ». Une régularité et un succès qu’il attribue à une capacité d’adaptation permanente et à la prise en compte d’un faisceau d’éléments qui permettent (ou non) la production de miel :
Être apiculteur, c’est savoir prendre en compte plein de détails et chaque année, c’est différent. Il faut faire des essais et des erreurs ; il faut comprendre le truc, c’est un peu comme avoir la main verte pour les plantes !
Damien veille également sur 15 ruches de reines, dédiées à la reproduction.
S’adapter à un climat qui change rapidement
Aujourd’hui, l’intervention qui consiste à déplacer les essaims de la tour aux ruches est une manœuvre presque routinière pour Damien : « La tour a évolué et les volumes à démonter sont plus réduits. Avec l’expérience et ma connaissance des abeilles, c’est beaucoup plus simple ». Les essaims récupérés permettent de (re)peupler des ruches des alentours, même s’il ne s’agit pas des abeilles les plus performantes « Génétiquement, elles sont un peu faibles, ce ne seront pas les meilleures productrices de miel ». Comme l’ensemble des apiculteurs, Damien constate les effets du changement climatique, particulièrement sensible en montagne : « Au printemps, les sauts de température peuvent être dangereux pour les abeilles. Un coup de froid peut les fragiliser et compromettre les récoltes à venir. Il faut rester très vigilant et s’adapter en permanence. ».
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